Quelques astuces d’éducation parentale (conférence d’Isabelle Filliozat – partie 2)
Dans la première partie de sa conférence « construire la relation autrement », Isabelle Filliozat nous a fait réaliser que les théories freudiennes ont considérablement influencé notre inconscient collectif, nous poussant à considérer nos enfants comme « des êtres incapables de freiner leur pulsion » et des « tyrans manipulateurs et assoiffés de toute puissance ». Selon la logique de ces théories, les parents doivent à tout pris contrôler, canaliser ces pulsions, pour ne pas se faire « bouffer » par leurs enfants.
L’un des moyens utilisés par la grande (l’immense) majorité des parents est la fameuse « punition ». Après nous avoir rappelé brièvement combien les punitions étaient inutiles (en tout cas pour le bon développement des enfants), Isabelle nous démontre, dans cette seconde partie de la conférence, à quel point il est préférable de s’intéresser aux « causes » des comportements de nos enfants, plutôt qu’à leurs conséquences… Elle en profite pour nous dévoiler quelques astuces d’éducation parentale.
Partie 4 – sommes-nous vraiment des « parents permissifs » ?
Isabelle Filliozat nous explique que la violence d’un enfant peut être déclenchée part :
- Un sentiment d’impuissance,
- Une mauvaise estime de soi,
- Le fait de ne pas savoir comment s’exprimer autrement,
- La « fuite des émotions » (je ne sais pas comment gérer ce qui se passe a l’intérieur de moi)
- L’impulsivité
Dans tous ces cas, la punition au lieu d’arranger les choses (d’aider l’enfant à se construire, à se forger une bonne image de lui-même, etc.) va, au contraire, aggraver le problème. Un enfant puni parce qu’il a tapé son frère… ressentira encore plus de haine envers son frère !
La punition n’aide pas l’enfant à se sentir compris, entendu.
Malheureusement, les « pseudo-experts » sont unanimes : le laxisme issu de la « génération mai 68 » est à l’origine des difficultés des parents à gérer leurs enfants (ils oublient à quel point l’environnement des enfants a changé). Alors comme il ne faut surtout pas être « laxiste » ou trop « permissif » (au risque de se faire « bouffer » par les « enfants-rois »)… il faut mettre plus de limites ! Mais aucune alternative n’est proposée !
Pourtant, nous sommes en réalité bien loin d’être si laxiste, et nos enfants bien loin d’être des « enfants-rois ». Isabelle Filliozat énonce alors des statistiques qui font froid dans le dos :
- 80% des parents frappent leurs enfants.
- Il y a beaucoup de punitions à l’école (dont beaucoup sont illégales).
- 75% des parents pensent que c’est « nécessaire de donner des punitions à l’école ».
- 73% des professeurs déclarent avoir déjà vu des « privations de récré » (interdites par la loi) – alors que seuls 28% disent y avoir recours.
- 56% donnent des « lignes », des « copiages divers », des « verbes à conjuguer » (interdits aussi, depuis 1887 !).
- 95% des élèves de CP ont été témoins de fessées à l’école !!!! 34% au CM2, – de 2% au collège.
En France ni les parents ni les enseignants ne sont permissifs ! Et pourtant c’est un fait, les enfants sont compliqués à gérés. Pour Isabelle Filliozat, parents comme enfants ont tout simplement besoins « d’outils », et ont surtout besoin de mieux comprendre ce qui ce passe en eux.
Isabelle nous parle alors de la théorie de l’attachement de John Bowlby qui explique que, dès la naissance, le bébé, l’enfant, est un être de « relations », un être « social », qui a besoin de se sentir en lien, de se sentir « appartenir »… un être qui peut donc avoir des « carences d’attachement ».
Selon cette théorie de l’attachement, une des causes les plus fréquentes des comportements « négatifs » des enfants (pourtant si peu connue des parents) est donc tout simplement le « manque d’attention ».
Lorsque c’est le cas, la mission du parent est double :
1- Réagir à ce comportement négatif « en connaissance de cause » (le punir ne servirait à rien, lui donner ce dont il a besoin serait plus utile : de l’attention, un câlin, etc.).
2- Lui expliquer le processus qui se passe en lui, pour lui permettre d’agir autrement la prochaine fois (« tu as certainement tapé ton frère parce que nous nous occupions beaucoup de lui et pas assez de toi, mais tu sais, tu peux faire autrement pour obtenir notre attention : nous demander un câlin par exemple »).
Partie 5 – chercher les causes… plutôt que punir les faits
Il est primordial de manifester de l’empathie vis-à-vis de nos enfants : essayer d’être à l’écoute, de sentir ce qu’ils ressentent à l’intérieur, pour pouvoir les aider à mettre des mots sur les émotions et à modifier la situation.
Selon la théorie de l’attachement, l’important c’est de chercher les causes des comportements, plutôt que de se focaliser sur les effets. Identifier la cause du comportement, c’est « doter son enfant des compétences nécessaires pour pouvoir gérer la situation » (régler les conflits, gérer ses émotions, etc.). En faisant cela, vous aider et faite grandir votre enfant plutôt que de le rabaisser en le punissant, en l’humiliant ou en le culpabilisant.
Chercher la cause, c’est souvent trouver le besoin non satisfait de l’enfant. Nourrir ce besoin, donnera beaucoup plus de résultats que de punir !
Une autre cause des comportements négatifs de nos enfants est aussi leur incroyable talent d’imitation : nos propres mauvais comportements sont mimés à la perfection. N’oubliez pas, nous, les parents, sommes leurs premiers modèles ! Si vous ne l’avez pas encore vu, regardez la vidéo « Children see, children do », ou celle de la campagne « l’exemple c’est nous » ci-dessous :
Une autre cause possible de certains comportements de nos enfants pourrait être la « transmission génétique ». Il a en effet été découvert, récemment, que les modifications d’ADN entrainés par un des traumatismes (maltraitances, abus sexuels…) se retrouvent dans l’ADN des deux générations suivantes (enfants et petits enfants). On ne sait cependant pas exactement les conséquences de ces modifications d’ADN sur le comportement.
Partie 6 – la méthode infaillible pour éviter les crises au supermarché
Changeons donc d’attitude lorsque nos enfants ont un comportement qui nous déplait : plutôt que de chercher à « gérer les fait », tentons de comprendre ce qui se passe à l’intérieur de l’enfant ! Quelle est la cause du comportement ? Isabelle prend l’exemple de la crise de l’enfant de 2 ans au supermarché :
Le cerveau de l’enfant, « sur-stimulé » (par les bruits, les couleurs, les mouvements, etc.) cherche pour se calmer, à se raccrocher à quelque chose qu’il connait : un nounours, un paquet de bonbons. Le parent, dans la plupart des cas, retire l’objet des mains de l’enfant, ce qui a pour effet d’entrainer dans son petit cerveau une réelle douleur et d’envoyer des décharges électriques dans tout son corps, provoquant la «crise » : l’enfant se jette par terre et gesticule dans tous les sens… mais c’est parfaitement « incontrôlé » ! Alors, sous l’influence inconsciente de la théorie des pulsions de Freud, le parent pense que son enfant cherche à le manipuler, à le forcer à acheter le nounours (il faudra donc lui mettre encore plus de limites !). Le fait que la crise de l’enfant cesse lorsque le parent s’éloigne va renforcer celui-ci à penser que ce n’est que de la « comédie », de la manipulation. Isabelle nous explique cependant que la crise cesse, en effet, parce c’est un réflexe archaïque du petit « mammifère » qu’est l’enfant : lorsque que sa « base sécure » (la personne avec qui le lien d’attachement est le plus fort) n’est plus là, le petit se fait « tout petit » et stop tout bruit et tout mouvement, pour ne pas attirer de danger, de « prédateur ».
Pour éviter la fameuse « crise du supermarché » la meilleure solution est d’occuper le cerveau de l’enfant en lui donnant des “missions” : « tu t’occupes des oranges », « tu ranges tout bien dans le caddie »…
Lorsque les besoins de l’enfant sont satisfaits, il y a moins de conflits ! Mais élever ses enfants sans limites ni punition ne veux pas dire passer son temps à tout leur expliquer et à tout leur laisser passer.
Il est bien entendu nécessaire de parler avec ses enfants de certains sujets importants (la séparation, la sexualité, la mort, etc..), mais tout expliquer, en permanence, sur toutes les petites choses du quotidien risque de « noyer » l’enfant sous un torrent d’information et ne le fera pas avancer. C’est à ce moment qu’Isabelle Filliozat fait référence à Adèle Faber et Elaine Mazlish en reprenant une de leurs habiletés parentales : “Le dire en un mot” (au lieu de parler en paragraphes… réduisez le message à un mot) ! Isabelle explique alors comment elle s’est servie de cette habileté avec son ado de 13 ans… dans la séquence 7, que nous aborderons la semaine prochaine.
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3 Comments
richart · 28 avril 2013 at 20 h 59 min
Nous avons un petit garçon de 17 mois, qui quand on lui dit non, il se tape ou tape sa tête sur le sol ou nous tape
Qu est ce que l on doit faire ?
de Boismenu · 9 décembre 2019 at 14 h 02 min
Bonjour Richart ! Je pense que dire juste « non » à un tout petit de 17 mois est dur pour lui.
Il exprime un besoin et ne le sent pas reconnu par ses parents, d’où sa colère.
Il faut user d’ « empathie » avec lui – comme on devrait le faire avec tout le monde !- c’est à dire, que lorsqu’il veut quelque chose qui n’est pas pour lui, par exemple, au lieu de lui dire seulement « non », il faut lui dire : » tu voudrais cela, mais ce n’est pas possible. Je comprends, ça te fait de la peine ! ».
Normalement il écoutera et s’apaisera car il comprend que vous reconnaissez son besoin, ou son envie, MEME si vous ne pouvez pas les satisfaire.
Ensuite vous pouvez l’aider à changer d’idée en lui donnant autre chose, ou en détournant son attention.
fanette · 18 mai 2020 at 15 h 24 min
bonjour
mon fils de 6 ans a des excès de colère dès qu’on ne lui donne pas ce qu’il souhaite, il peut balancer des choses, lever la main sans taper, mais un regarde de colère, faire blablabla quand on veut lui parler…
je suis un peu perdu et l’impression de laisser faire, à part l’isoler mais même ça, c difficile..
merci